RENARD R-35
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C'est en Belgique, à l'usine Renard, que fut
étudié et construit le premier avion commercial à cabine pressurisée; ce
programme fut élaboré au cours des années précédant la seconde guerre mondiale. Pour reprendre les termes employés à
l'époque, «cette disposition soustrayait équipage et passagers aux variations
de pression de l'air en altitude et rendait possible la navigation dans des conditions météorologiques plus favorables. Franchir
sans danger les plus hauts obstacles était
également un facteur non-négligeable. De surcroît, les passagers bénéficiaient d'un confort accru du fait de l'isolement parfait
(mécanique et thermique) de la cabine avec le milieu extérieur; même près du
sol, les variations de pression dues à une descente rapide n'auraient pu produire
dans l'oreille les perturbations si désagréables et l'assourdissement
prolongé qui en découle». De nos jours, il
est hors de question d'entreprendre un long voyage aérien autrement que dans un avion équipé d'un dispositif
de conditionnement d'air aussi, pour comprendre le sens de la littérature que l'on vient de parcourir, faut-il
se reporter à l'esprit des années 1937-1938 pour saisir toute l'attention que
pouvait susciter cette innovation. Cette littérature, qui paraît désuète aujourd'hui, marquait cependant un désir de
perfectionnement. Recherchant le moyen de ramener dans des proportions
raisonnables la fatigue physique d'un pilote dont les facultés sensorielles
risquaient de s'émousser après un vol de longue durée à haute
altitude, la firme Renard développa le
trimoteur R-35. Après les calculs, plans et essais de la maquette au tunnel
de Rhode-St-Genèse, la construction fut entreprise. Le R-35 pouvait être équipé de n'importe quel type de moteurs de
700 à 950 CV. Le prototype devait
recevoir trois Gnome et Rhône K.14 de 950 CV, toutefois, les photos d'époque
le montrent équipé d'un «9 cy1.» Gnome et Rhône K.9 de 700 CV. La silhouette demeurait classique, si ce n'est la
présence de hublots de petites dimensions remplaçant
les fenêtres habituelles. Ce ne fut pas à Charles Rooms que fut confiée la
mise au point mais à Georges Van Darnme, un adjudant de réserve de
l'Aéronautique militaire. Le prototype s'écrasa lors de son premier vol, le 1er avril 1938. La revue «L'Aviation Illustrée» du mois de mai rappela dans
son éditorial que les conditions atmosphériques n'étaient pas favorables pour
entreprendre les essais du R-35 et mit en cause la responsabilité du chef
d'aérogare de Bruxelles-Evere qui, suivant l'éditorialiste, aurait dû en
interdire le décollage. Des témoins rapportent aujourd'hui encore, que le trimoteur ne
devait pas décoller, le pilote devant se limiter à rouler «queue haute» pour
présenter l'avion aux personnalités et aux journalistes de la presse écrite
et filmée qui avaient été invités à la démonstration. Alfred Renard recevait
des fonds du FNRS en fonction de l'avancement des travaux. Une première
tranche avait été versée pour la fabrication des divers éléments de l'avion,
une tranche suivant pour l'assemblage, une autre pour le montage des moteurs
et ainsi de suite. Les évolutions du
1er avril 1938 devaient démontrer la maniabilité de l'avion au sol et surtout
présenter l'avion au public, ce qui devait permettre l'obtention de la
tranche suivante et poursuivre l'aménagement et les essais de l'appareil qui
ne devait pas décoller ce jour-là. A bord d'un avion dont les calculs de poids et de centrage n'étaient pas terminés, Van Damme aura peut-être voulu en
faire plus que ce qui était prévu au programme. Tous ces témoins, anciens navigants
pour la plupart, s'accordent à penser que l'adjudant G. Van Darnme était
réellement un pilote d'acrobatie sensationnel mais qu'il n'était pas l'homme
indiqué pour procéder aux essais d'une machine si différente de celles qu'il
avait l'habitude de piloter. On ne vit pas longtemps la silhouette trapue du Renard R-35,
avion de formule inédite qui fut une belle preuve du dynamisme aéronautique
belge d'avant-guerre. Le OO-ARM, immatriculé le 28 mars 1938 sous le
n° 434, fut rayé le 23 mai des registres de l'Administration de
l'Aéronautique. Un accident que l'on aurait pu qualifier de banal s'il n'avait
pas été aussi tragique: la mort d'un pilote et l'anéantissement d'un projet. Les causes restèrent très obscures. On parla d'une rentrée
prématurée des volets d'intrados mais sans aucune preuve. Quoiqu'il en soit,
était-ce une bonne formule de décoller seul à bord d'un
trimoteur comportant autant de nouveautés? N'était-ce pas là une preuve de
témérité excessive? Le R-35 disparut emportant son secret. Le poste de pilotage fermait la partie avant
du caisson étanche en alliage léger. La partie arrière comportait une
ossature métallique laquelle était recouverte de toile afin de réduire le
poids et le moment d'inertie. Les divers dispositifs spéciaux tels que la porte et les deux
sorties de secours aménagées dans le plafond de la cabine étanche, les
boîtes de passage pour commandes, les soupapes et accessoires n'avaient pas
augmenté le poids de plus de 200 kg, soit 2 % du poids total de l'appareil. |